La restauration, je le savais par expérience familiale, n’est pas de tout repos ! Et quand il s’agit de faire serveuse/barman en haute saison à Bariloche (Argentine) encore moins ! Récit.
La recherche : Après m’être présentée dans divers restaurants, bars, boulangeries, épiceries de Bariloche (Argentine), j’obtiens une journée d'essai dans un hotel**** restaurant. Tout cela une semaine après mon arrivée au pays. On me demande de venir avec la fameuse tenue de serveuse : chemise blanche et pantalon noir, Ufff Que calor ! Comme si dans mon sac a dos j’avais pensé que j’allais enfilé une telle panoplie avec 30 degrés au thermomètre ! Bref, je fonce en ville dégoter un jean à bas prix et avise le personnel de l'hôtel que je n'ai pas de chemise et encore moins de fer à repasser, illico presto, il m'en trouve une.
Salle des employées pour se changer.
Itinéraire de la maison au lieu de travail : Il me faut de bonnes jambes et une casquette. Sous un soleil de plomb, vaut mieux se couvrir le ciboulot et prévoir une bouteille d’eau dans le sac à dos. Le retour c’est idem sauf qu’au lieu de descendre les petits chemins terreux, ça monte ! 1km, ca use ca use ca use...📷📷
Ce sentier de terre est un raccourci ! Ils sont nombreux à Bariloche, il suffit de les repérer dans la forêt et de s’y faufiler pour gagner quelques mètres de marche.
En allant (JOUR) / en rentrant (NUIT)
Hey oh hey oh on rentre du boulot📷
Une journée type : Je prends mon poste à 16h, je sors donc de chez moi à 14h30 car le bus passe vers 14h55. Il me faut 15 min pour descendre en marchant d’un bon pas. Puis 20/25 min de bus (trajet vue sur le lac) pour rejoindre l’hotel/restaurant. Par chance l’arrêt de bus s’arrete juste devant mon lieu de travail ! Il ne me reste plus que 4 min de marche jusqu’à l’entrée du batiment.
Le fameux bus n°20, très bondé, est la ligne principale de Bariloche. Le soir, il passe toutes les 40 min, autant dire qu'il vaut mieux speeder si on ne veut pas le rater en sortant du travail et attendre le prochain !
Horaires sur le lieu de travail :
16h-> jusqu'à 11h30/1h10 ça dépend selon le départ des clients
Ouverture des cuisines avec service en salle : 20h30
Mes tâches : -Assurer le service au bar (cocktails, boissons chaudes, citronnades, smoothies, encas...) que ça soit en terrasse, à la piscine, en chambre, au salon de thé ou au resto. -Checker la mise en place : fruits, cuillères, stocks... -encaisser les consommations -nettoyage general -Assurer le service au restaurant, du service au nettoyage jusqu’à l’encaissement et au dressage des tables -Préparer la mise en place du petit déjeuner : dressage des tables et du buffet -passer la cire sur le parquet (le monument est classé historique donc il faut faire briller la boiserie📷) -Avec un chiffon imbibé d’alcool et d’eau, lustrer chaque verre, assiette, couvert et coupelle...! -fleurir les tables avec les fleurs du jardin
Composition dressée sur les tables du restaurant
Conditions :
En tant qu’employée de l’hôtel restaurant bar, je n’ai pas le droit de me servir un café ou autres choses à grignoter. Mes anciens collègues volaient alors c’est l’heure aux restrictions et c’est bibi qui trinque !
L’astuce : apporter des fruits et gâteaux pour se caler vers 18h afin de patienter jusqu’au diner à la maison, histoire de ne pas se coucher le ventre vide.📷📷📷
Enfin ça, c’etait les 1ers jours car au bout du 5ème, après negoc avec le grand patron, on peut desormais boire un cafe avant le service et une assiette nous est préparée par le cuisinier en fin de service.
Profil de la clientèle :
Couples avec bebes et enfants de bas âges, retraités, groupes, famille...
Brésiliens, argentins, français, américains...
Anecdotes : -Un groupe de motards français trouvaient que je parlais drolement bien leur langue sans accent, logique je suis française ! Je sympathise bien avec cette bande bien en forme. -Intoxication alimentaire. Un samedi, jour le plus chargé, une envie de vomir puis 2 et 3 arrivent dans l’après midi ! Entre deux clients, je pars vomir aux toilettes réservées au personnel. Sachant qu’ils se cachent au fond d’un grand couloir, vaut mieux anticiper ! -l’ascenseur : ouverture et fermeture manuelle. Quand il faut monter des commandes en chambre au-delà du 1er étage, j’emprunte l’ascenseur qui s’ouvre et se ferme ainsi ; en 1er la porte battante, en 2ème une grille qui coulisse manuellement. A cela, ajouter un petit rebond au décollage et à l’arrivée, autant dire que les cafés et cocktails se font parfois la malle📷📷📷oups !
-Les propriétaires? Un couple qui a plusieurs hôtels restaurants et quand ils viennent séjourner dans celui de Bariloche, autant dire qu'il faut les traiter comme des VIP. Grrrr ces patrons qui posent leur fesses, commandent leur repas dans leur chambre, changent d'avis tous les jours, passent les derniers à table...Mais bon, ils m'employent et me donnent cette chance de travailler alors je ne crache pas dans la soupe et m'exécute.
Pliage de service en tissus, on n'est pas chez McDo ici, protocole et blabla exigés !
La particularité de travailler dans un établissement argentin :
-Les clients demandent qu’on remplisse des thermos d’eau chaude pour leur maté
-je peux rajouter sur mon CV : permis de lustreuse / cireuse à parquet !
Moi en train d’apprivoiser la lustreuse ! Toute une histoire, au début, ça bouge dans tous les sens, je me suis fait balader de gauche à droite mais après quelques gouttes de sueur, j’ai pigé le système et maîtrise la bête !
Les collègues : (les noms sont factices)
-Juan, le cuisinier ! Il élabore la cuisine du restaurant à partir des herbes aromatiques du potager, travaille le poisson frais du lac : truite... Le pain est aussi fait maison...Bonne cuisine, il est doué et super tranquille, aux heures de la mise en place et du service, soit il met du Bob Marley ou du rock argentin à fond !
-Beatrice, la responsable de salle. Boulot, boulot, boulot...Elle pense boulot, vit boulot, mange boulot. Pendant la haute saison, elle n'a aucun jour de repos. En saison hivernale, elle reste carrément dormir sur place car avec la neige sur les routes, il est difficile d'atteindre l'hôtel depuis le centre ville de Bariloche, où elle vit avec ses parents, tous les deux malades.
-Alex, la deuxième serveuse. Mère d'une grande tribus d'enfants, elle a un solide bagage dans la restauration. Malgré ça, elle est hyper cool et ne se prend pas pour la petite chef. Quand on travaille les deux; efficacité, humour sont au RDV. Et si on a un peu de temps, on regarde des vidéos Youtube pour maîtriser la mousse des Cappuccino et apprendre à faire de nouveaux cocktails !
Le petit + : elle possède une voiture, c'est jour de fête quand on bosse ensemble car au lieu de rentrer en bus, la plongeuse, le cuisinier et moi rentrons en Duster. Elle nous dépose les uns après les autres à nos arrêts de bus respectifs.
-Sandra, la tournante. Elle travaille lorsque les autres serveuses sont de repos. Cette jeune mère de famille de 23 ans fait plus d'1h de trajet pour venir travailler.
-Lili, la plongeuse. Un petit bout de femme avec un énorme coeur et une force de travail incroyable. Grâce à elle, je grignote du pain et des frites le temps du service. En complément de son revenu de plongeuse, elle vend des "tortas fritas"dans la rue et donne un coup de main à certains membres de sa famille.
Ressenti :
Des courbatures dans tout le corps ! En moyenne par jour, je marche 11km. Le lieu est tellement grand que pour chaque commande, ce sont des galopades à n’en plus finir, des portes battantes à pousser avec la jambe...
Entre 16h et 00h je dois m’asseoir type 5 min pour plier les serviettes de table (les jours de grand boom évidemment). Il y a aussi des jours plus calmes où clairement on se fait chier les aprem.
Salaire à la journée :
1000 pesos argentins soit 15 euros.
Pas d’heures supp payées, vous avez cru qu’on etait en France?!!!😅
Ca ne parait peut etre pas grand chose pour nous français mais pour ici c’est pas mal, enfin c'est acceptable !
En moyenne pour une personne qui travaillerait le mois entier, 6/7j ce serait un salaire de 30000 pesos soit 449 euros. Ma collègue par ex gagne ce montant avec zero jours de congés durant la haute saison, je ne vais donc pas me plaindre.
Ajouter entre 100 et 350 pesos de pourboire par soir (4euros). En Argentine, on partage tout entre les cuisines, la salle et la plonge, c’est ça l’esprit d’equipe; que serait un serveur sans un cuisinier et vice versa.
Bilan :
Je suis KO au bout de 5 jours de travail et décide de réduire la cadence. J’en discute avec le grand patron qui s’arrange pour me donner 2 jours de repos par semaine. Désormais je ne travaille plus que 5 jours par semaine, enfin, ce rythme est ephemere car il me demande de venir davantage. J'accepte pour un moment. Quand le travail se présente, il s'accepte. Au bout d'un mois, je rends l'éponge. C’est mieux si je veux avoir le temps et l’énergie de connaitre aussi un peu mieux les environs. Je pars en bon terme avec toute l'équipe de l'hôtel, la larme à l'oeil. J'ai eu la chance de rencontrer des personnes attachantes, de plusieurs niveaux sociales : employés, clients primés en photographie, couples de la capitale...
Conclusion :
L’idée de partir vivre à l'étranger n’était pas celle de me dorer la pilule tous les jours au bord du lac, mais de n’insérer doucement dans la vie quotidienne des argentins, de comprendre leurs impératifs, problématiques mais aussi leurs envies. Durance ces mois en Amérique latine, je souhaite gagner localement ce que je dépense sur place. Il parait que le circuit court est tendance... Désormais, je m'attèle à une autre activité : vendre des sandwichs de Milanaise dans la rue ! Ma petite entreprise ne connait pas la crise.
Le mot de la fin :
« La vie ce n’est pas que du trekking et des bières fraîches ! »😛💪🏼🍻😋
Kommentare